mercredi 5 octobre 2022

Erckmann-Chatrian - Maître Daniel Rock (illustré par Georges Villa)

 


 

ERCKMANN-CHATRIAN (Émile Erckmann et Alexandre Chatrian).

Maître Daniel Rock.

Avec douze gravures imprimées en couleurs de Georges Villa.

 Paris, Éditions du Sagittaire, 1931.

 


In-8° (155 x 213 mm.) demi-chagrin tabac, dos à 5 nerfs insolé portant à la queue les initiales « G. F. », couverture rempliée conservée, 237 p., illustrations hors texte, exemplaire numéroté sur vélin Aussedat, (collection « Byblis »).

 


 

Extrait de l'article de Henri Hatzfeld :
   Maître Daniel Rock [est] une nouvelle des débuts (1860) qui raconte la résistance du vieux forgeron d'un village des Vosges à la construction de la ligne de chemin de fer Paris-Strasbourg. Ce n'est pas l'un des meilleurs récits d'Erckmann-Chatrian. Le ton n'est jamais trouvé : on hésite entre le romantisme fantastique des premiers contes (Hugues le loup) et le réalisme satirique. Mais ces dissonances, cette ambiguïté de l'écriture sont significatives d'une ambiguïté plus profonde, d'une insurmontable hésitation de nos auteurs. Entre Daniel Rock, symbole du monde médiéval destiné à disparaître et les ingénieurs du chemin de fer qui introduisent simultanément le progrès et la corruption morale dans les vieux terroirs jusqu'ici isolés, Erckmann ne choisit pas. Il incline au cours de l'œuvre pour l'un et pour les autres selon les fluctuations d'un style et d'une pensée qui ne s'affermissent jamais. Certes les derniers mots appartiennent à l'ingénieur, c'est-à-dire au progrès : « Lorsqu'on se demandera plus tard ce que faisaient les hommes de sentiment à l'époque de ces grandes découvertes, de ces travaux gigantesques et qu'on apprendra qu'ils prêchaient le Moyen Âge, les vieilles doctrines et les vieux principes, je me persuade qu'on ne leur attribuera pas le plus beau rôle de notre histoire et même je crains que les esprits malveillants ne les taxent d'avoir été les frelons de la ruche. » Mais ces ultimes réflexions ne sauvent pas MM. les ingénieurs et leurs « petites dames » non plus que ce maire imbécile qui ne fait l'éloge du progrès que pour plaire à M. le Sous-Préfet de Sarrebourg. Maître Daniel Rock, Don Quichotte de l'artisanat, a bien autrement de caractère. En fait, si Erckmann ne se range ni d'un côté ni de l'autre, c'est que son monde à lui se situe précisément ailleurs, ou si l'on vent entre le Moyen Âge et la Civilisation industrielle. C'est le monde sur lequel se greffent en quelque sorte la Révolution et l'Empire, le monde de la fin du XVIIIe siècle et du début du XIXe siècle loin des villes. C'est le siècle de Jean-Jacques : la classe ouvrière n'y a pas encore de place. Les républicains Erckmann et Chatrian se diront assez facilement socialistes en 1848. Mais ils condamneront les « communistes » de cette époque comme les communards de 1871. Hommes de progrès, nos auteurs ont déjà pris du retard.


Bibliographie :
   - Hatzfeld (Henri), Erckmann-Chatrian et la culture populaire, dans Esprit, n° 320, pp. 324-325.

 

35 euros (code de commande : 00089).

 

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